Violée au sein d’une secte: elle témoigne contre un «prêtre» de Raël

Une ex-membre de la secte des raëliens qui aurait été violée à répétition par un « prêtre » de l’organisation a offert une rare incursion au sein de ce mouvement, où elle dit avoir été forcée de se plier à son autorité pendant une longue décennie.
« Ceux qui avaient son niveau hiérarchique, on les appelait ‘les guides’. J’étais humiliée, confuse, je ne savais pas comment me sortir de la situation », a expliqué la femme ce jeudi au palais de justice de Montréal.
Témoignant derrière un paravent, la femme témoignait au procès de Bobby « Lear » Potvin, pour de nombreuses agressions sexuelles qu’il aurait commises dans les années 1990, alors que la secte de Raël, alors basée au Québec, était en pleine expansion.
L’accusé, âgé de 61 ans, a plaidé non coupable.
La plaignante, dont l’identité est protégée par la cour, a expliqué s’être jointe à la secte au début des années 1990, après y avoir été introduite par une amie.
« Je l’avais accompagnée à une fête raëlienne, et quelques semaines plus tard, j’ai reçu un appel de l’accusé, c’était un haut gradé de l’organisation », a témoigné celle qui était à l’époque une jeune adulte.
Le camping Havana Resort, où était situé UFOLand des Raeliens à Maricourt en Estrie
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D’abord chez lui
Rapidement, Potvin se serait invité chez elle. Après une brève discussion, il l’a embarqué dans sa voiture pour se rendre à son propre domicile dans l’est de Montréal. C’est là qu’elle aurait été violée une première fois.
« Je me débattais avec la tête dans le futon, mais il était plus costaud que moi, a-t-elle dit. Après, il est retourné manger ses bagels. »
Bobby Potvin, alias “Lear” (Rael à l’envers) est un ex-membre de la secte de Raël. Il est vu ici au palais de justice de Montréal, le 23 janvier 2025, où il doit subir un procès pour agression sexuelle. PHOTO MICHAËL NGUYEN
Photo Michaël Nguyen
La plaignante affirme n’avoir plus eu de nouvelles de la secte pendant plusieurs mois. Elle s’était toutefois renseignée sur les propos de Raël sur « l’origine de la vie ». À l’époque, elle avait trouvé que « ça avait un peu plus de sens que le catholicisme », si bien qu’elle s’est officiellement jointe au mouvement.
« Il y avait environ 200 ou 300 personnes dans la salle de réception, on a reconnu publiquement qu’on adhérait au mouvement, a-t-elle expliqué. C’est lui [Potvin] qui avait été désigné pour faire le ‘baptême’. Je tremblais, je pleurais, les gens pensaient que c’était de joie… »
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Coincée
Son enfer ne faisait toutefois que commencer puisque peu après, il aurait commencé à abuser d’elle, que ce soit lors d’un camp de méditation en banlieue de Québec, chez lui, dans des toilettes, sur un terrain de camping en Estrie, où lors de « dimanche de méditation ».
« Je me sentais coincée, soumise, obéissante », a expliqué la femme à propos de la fois où Potvin aurait assouvi sur elle des fantasmes fétichistes.
Les abus auraient duré 10 ans, durant laquelle la femme a vu son estime de soi anéantie.
« C’était ma fonction [de le servir], c’était la seule valeur que j’avais », a-t-elle dit d’une petite voix.
Les abus auraient cessé après une hospitalisation à la suite d’une tentative de suicide, si bien que Potvin se serait « désintéressé d’elle ». La femme croit que Potvin a ensuite été exclu de la secte, bien qu’aucun détail n’a été donné à ce stade-ci des procédures.
Le procès, devant le juge Thierry Nadon, est prévu pour sept jours.Me Kahina Rougeau Daoud agit pour la Couronne, tandis que Me Pierre Poupart représente Potvin.